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Google Ads et le droit des marques pour les mots-clés

6 novembre 2022 – Guillaume Degré

L’annonce du changement de politique de Google vis-à-vis de l’utilisation des marques comme mots-clés en France et en Europe, suscite de nombreuses questions, mais aussi des erreurs d’interprétations possibles sur ce qu’on aura le droit de faire (ou pas) à partir du 14 septembre 2010.

En effet, à compter de cette date, Google Adwords ne vérifiera plus la présence de noms de marques dans les mots-clés achetés.

Concrètement tout le monde « pourra » enchérir sur des mots-clés liés aux noms de marques, ce qui ne signifie par pour autant que tout le monde aura « légalement » le droit de le faire !

Les conséquences des nouvelles conditions de l’utilisation des marques sur Google Ads

Cela dépendra des accords et autorisations que vous avez et c’est la première conséquence de cette annonce : les marques vont devoir adapter leurs conditions, éventuellement signer des « gentlemen agreement » avec leurs concurrents pour limiter les agressions et pour les distributeurs de négocier ou renégocier les conditions d’utilisation avec une marque.

L’utilisation des mots-clés liés aux marques ne concerne que l’usage de la recherche, il est toujours interdit d’utiliser le nom d’une marque concurrente dans une annonce pour le moment, car la France reste l’un des seuls pays où cette restriction existe encore dans le monde.

2ème conséquence : les annonceurs qui n’achètent pas encore ou qui refusent d’acheter leurs marques sur Google Adwords « parce qu’ils sont 1er en référencement naturel » auront tout de même grand intérêt à le faire dans l’avenir car ils ne pourront plus empêcher en amont l’utilisation de leurs marques par des distributeurs autorisés ou non.
Jusqu’à présent Google assurait automatiquement une veille et un blocage sur les mots-clés déclarés comme marque, avant tout dans son propre intérêt pour limiter les procès entre eux et les annonceurs dépositaires des marques.

Demain, cette surveillance de Google, gratuite, prend fin et ce sera aux entreprises de mettre en place leur propre veille pour vérifier l’utilisation de leurs marques dans Google Adwords avant de décider ou non d’engager une action en justice, c’est la 3ème conséquence de cette annonce.

 

Pourquoi les mots-clés touchant à des noms de marques sont-ils si stratégiques ?

Ces mots-clés ont quelques choses de magique, ils sont généralement à la fois ceux :

  • qui ont le meilleur CTR (de 10 % à 30 % de taux de clics),
  • qui convertissent le plus en vente ou action utilisateur sur le site, du fait du pouvoir de la marque, de l’attachement et la proximité de ses utilisateurs avec celle-ci,
  • qui ont le niveau d’enchères (CPC) relativement faible, généralement inférieur à 0,15 € le clic, enfin jusqu’à présent…

Car la fin du filtrage va créer un afflux de nouveaux annonceurs qui va engendrer une inflation des CPC les premiers mois, le temps que les annonceurs ajustent et stabilisent leurs enchères afin de préserver un ROI intéressant en fonction des taux de transformation des campagnes « marques ».

Toutefois, malgré cette inflation passagère, cela n’enlève rien à l’intérêt d’enchérir sur sa propre marque dans Google Adwords pour un annonceur.

D’une part pour renforcer la visibilité et le trafic du site officiel rattaché à la marque en question, renforcer la position de leadership et de légitimité et d’autre part pour ne pas laisser tous les bénéfices de ce trafic et visibilité aux sites de distributeurs directs et indirects, et ce, même si le site « marque » est en 1ère Position en SEO dans les résultats organiques.

Contrairement à une idée très répandue, le fait d’apparaitre à la fois en référencement naturel et en liens sponsorisés sur un mot-clé a pour effet de capter plus de recherches et donc plus de trafic en réalité (de 5 % à 15 %) en couplant SEO et SEA.

D’un point de vue opérationnel, le fait d’avoir une campagne Adwords avec un CTR très élevé amène à avoir un Quality Score important. Une bonne pratique pour réduire le CPC de mots-clés génériques et concurrentiels, consiste à les ajouter dans la campagne « marque » pour leur faire bénéficier de ce Quality Score élevé.

 

Qu’en est-il de l’utilisation des marques sur le réseau de contenu Google Adsense ?

Sur son réseau de contenu, Google n’a jamais réalisé ce type de vérification par rapport à l’utilisation de marques comme mots-clés, et il sera toujours possible d’utiliser une marque pour afficher des annonces sur le réseau de contenu Google Adsense, et ce, sans que cela ne puisse être réellement détecté par les marques.

En effet, ces annonces ne sont pas déclenchées par la recherche d’un mot-clé, mais uniquement par la présence de ce mot-clé dans le corps de la page du site de contenu et si ce mot-clé est dans la campagne Adsense.

Ce sera donc toujours le far west pour les marques car, sans moyen de détection, il sera très difficile de vérifier et prouver qu’un annonceur a sciemment ajouté une marque en mot dans ses campagnes Adsense…

 

Les conséquences juridiques du changement de politique de Google Ads

Vous l’avez compris, malgré l’annonce de Google de ne plus vérifier en amont les mots-clés « marque », cela ne signifie pas les obligations des annonceurs vis-à-vis du droit des marques.

Pour répondre à certaines questions, nous avons sollicité l’avis d’un spécialiste juridique, Emmanuel Harrar du cabinet Dreyfus & associés, Conseils en Propriété Industrielle, qui a accepté de répondre à 3 questions, correspondant à 3 exemples concrets d’applications pour essayer de lever les doutes pouvant subsister sur l’utilisation des marques comme mots-clés dans Google Ads.

 

Question 1 : cette annonce signifie-t-elle que n’importe quelle marque pourra légalement acheter les marques de ses concurrents (ex : Peugeot pourra-t-il acheter le mot clé Renault ? )

Le communiqué de presse de Google indique qu’il ne procèdera plus pour les pays de l’Union européenne et de l’AELE à un contrôle de l’achat des mots-clés. Les titulaires de marques qui avaient pris la précaution de demander un « blacklistage » à titre préventif de leurs marques ne pourront plus bénéficier de ce service (https://dreyfus.fr/blog/).

Ce changement de politique de Google fait suite à la décision de la CJUE du 23 mars 2010 (affaires jointes C 236/08 à C 238/08) qui précisaient que « le prestataire d’un service de référencement sur Internet qui stocke en tant que mot clé un signe identique à une marque et organise l’affichage d’annonces, à partir de celui-ci, ne fait pas un usage de ce signe au sens de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 89/104 ou de l’article 9, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 40/94. ». Ce qui signifie que Google ne fait pas un usage à titre de marque des termes utilisés pour les AdWords et que Google ne peut pas être poursuivi sur le terrain du droit des marques.

Il faut cependant noter que la CJUE n’exempte pas l’annonceur et précise que sa responsabilité pourra être engagée. Ainsi, la responsabilité de Google pourrait être engagée si après notification par le titulaire de droits de la présence d’annonces illicites, celui-ci ne remédie pas promptement à la situation.

La réponse à la question ne peut être qu’une réponse nuancée : cela dépend de la situation. Plusieurs facteurs seront alors à prendre en compte pour évaluer la licéité de l’annonce : le contenu de l’annonce elle-même et le public visé par l’annonce. Il conviendra de déterminer la législation applicable. En effet, le droit national s’appliquera pour déterminer la responsabilité de l’annonceur et les solutions seront différentes selon les pays considérés.

 

Question 2 : je suis un site de comparateur de prix ou bien je fais de l’affiliation, puis-je acheter légalement les mots-clés des produits que je compare ou propose ?

Ces deux hypothèses semblent différentes dans leur approche même si effectivement le résultat est identique, à savoir diriger l’internaute vers un site marchand ou non.
Le comparateur de prix qui utiliserait des marques comme mots-clés se place dans le cadre de la publicité comparative. Dans la mesure où les règles de la publicité comparative sont respectées et que les sites marchands référencés proposent des produits authentiques et dont la distribution est autorisée, sa responsabilité ne devrait pas être engagée.

Le cas de l’affiliation est bien différent puisque dans cette configuration l’organisateur de la campagne d’affiliation propose à des sites tiers des liens sponsorisés puis bénéficie directement de la campagne publicitaire, puisqu’il est rémunéré par le site cible.

Plusieurs hypothèses d’affiliation existent.

La campagne renvoie vers un site où des produits concurrents sont en vente : la responsabilité de l’organisateur de la campagne pourrait alors être engagée sur différents fondements (concurrence déloyale, détournement de clientèle…) en fonction du cas. Mais là également, la solution juridique n’est pas universelle et dépend largement du droit national.

La campagne est organisée avec le titulaire de la marque : dans cette configuration, ce sont les conditions contractuelles entre les parties qui régiront l’usage de la marque, en particulier à titre de mot-clé. Il est cependant rare dans la pratique qu’une société, qui utilise des programmes d’affiliation pour générer du trafic sur son site, autorise l’usage de la marque dans une campagne AdWords. En effet, la campagne serait extrêmement coûteuse, la campagne AdWords générant un « trafic artificiel » vers le site cible.

 

Question 3 : dans le cadre d’une campagne sur Google Ads, mes annonces apparaissent sur des recherches génériques associées à une marque alors que je ne l’ai pas acheté en mot-clé, puis-je être poursuivi tout de même ?

La problématique des campagnes AdWords en requête large est un véritable serpent de mer. En effet, les mots-clés utilisés en requête large peuvent déclencher des annonces pour des produits concurrents sans que l’annonceur n’en soit informé. Reprenons votre exemple de constructeurs automobiles et supposons que Peugeot lance une campagne de publicité sur Google en utilisant les termes « voitures électriques ». L’internaute qui fera une recherche Google sur les « voitures électriques Renault » verra s’afficher une publicité pour les véhicules du concurrent, et ceci sans que l’annonceur ne soit directement responsable.

La solution juridique est là également une question d’appréciation des tribunaux et d’application des législations nationales. Une décision récente de la cours d’appel de Paris du 19 mai 2010 a précisé la responsabilité de l’annonceur dans un cas similaire (https://dreyfus.fr/blog/). Une des solutions juridiques pour la France passerait par l’emploi de mots-clés négatifs. Ces mots-clés négatifs permettent d’empêcher l’affichage d’une annonce. L’annonceur devrait alors paramétrer dans sa campagne AdWords les noms de ses concurrents en mots-clés négatifs. Il restera à déterminer dans quelles limites une société peut être concurrente d’une autre…

Guillaume Degre-responsable bu ADS-nantes -Noiise
Guillaume Degré
Head of ADS

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